Le numérique a créé une rupture dans les modes de travail, les relations hiérarchiques et les prises de décision.
Les compétences et les talents, les principaux carburants de la compétitivité
Michel Barabel dans son article « Comment le numérique rebat les cartes des compétences »(1) explique que la compétence était considérée comme un stock et un actif au 20ème siècle puis qu’elle est devenue un flux au 21ème siècle, sous les effets de la révolution numérique.
Avec le développement majeur du numérique les organisations pyramidales ont été remplacées par des organisations en réseau, collaboratives et où la transversalité et l’horizontalité des échanges permettent à chacun non seulement d’appréhender la performance de l’entreprise mais aussi d’y contribuer. Autrefois la vision stratégique et globale de l’activité de l’entreprise était l’apanage des managers. Désormais, l’entreprise est plus ouverte à l’intérieur et vers l’extérieur, connectée et apprenante. Le numérique a créé une rupture dans les modes de travail, les relations hiérarchiques et les prises de décision.
Considérant que 70% des emplois de 2035 n’existent pas encore, Michel Barabel(1) indique que l’accumulation de compétences n’est plus la clé de la réussite professionnelle et que l’employabilité d’un individu dépend désormais de ses “soft skills“. « Ces compétences sont par nature plus durables (que les “hards skills“), plus difficiles à acquérir et parmi elles on identifie : la capacité à coopérer, l’empathie, l’écoute, la résilience, l’agilité, la capacité de curation digitale, les compétences informatives (sélectionner la bonne information, les capacités créatrices et disruptives, la capacité à penser de manière systémique, penser la complexité…). »
Dans ce contexte, les managers de proximité ont un nouveau rôle clé à jouer pour que les aspirations et les compétences des collaborateurs soient en phase avec les besoins et la culture de l’entreprise. L’enjeu ultime étant de faciliter les interactions et de créer la synergie nécessaire au développement de la performance individuelle et collective afin d’atteindre les objectifs actuels et futurs de l’organisation (comme notamment assurer sa compétitivité, gage de pérennité). Ceci implique une autre gestion des intelligences et d’adopter une nouvelle approche managériale…
Les vieux modèles de la réussite individuelle sont désuets
Les diplômés des grandes écoles ont vécu un modèle de formation initiale dans lequel leur ont été enseigné la compétition, la tactique et les savoirs utiles pour diriger (décider et manager) ainsi que pour survivre à leurs adversaires. Promis à occuper le plus haut rang, ils sont aujourd’hui confrontés à un tsunami auquel les enseignements reçus ne les avaient pas préparés. Effectivement, quiconque est né avant l’avènement d’Internet et se trouve en activité professionnelle aujourd’hui traverse une période de transition sans précédent caractérisée par la mondialisation, une rupture technologique majeure et une accélération du temps que nos aïeux n’ont pas connu. Il est d’ailleurs à noter que l’on observe aujourd’hui une désaffection des jeunes diplômés d’école d’ingénieur pour le métier de manager.
Il leur faut donc apprendre à rester performant avec de nouvelles cartes entre les mains. Les seules certitudes de ce changement (imposé comme un nouveau système dont on a hérité) étant que les clés du succès d’aujourd’hui ne figuraient pas dans les manuels de l’école d’hier, et que plus rien ne peut fonctionner comme avant.
Ce n’est pas tant que cette élite n’a pas la vision stratégique attendue d’elle ni qu’elle ne se soucie pas des autres, mais plutôt que la situation d’urgence vécue peut enclencher une résistance au changement ou des mécanismes de défense tels que le repli sur soi et la réassurance l’incitant à se raccrocher à ses acquis et à ses vieux réflexes. Parfois, il lui faut sacrifier ce qu’elle a déjà bâti pour s’engager sur de nouvelles pistes, et fonctionner par itération pour créer.
Le top management doit ainsi réinventer son kit de survie pour adopter un style de management plus démocratique, participatif et collaboratif. Alors même qu’il lui reste une dizaine d’années avant la retraite, l’on attend de lui qu’il soit en quelque sorte son propre « ubérisateur ».
Si la curiosité intellectuelle et les valeurs humanistes de certains permettront à ceux-ci d’éviter le sentiment d’automutilation, d’aucuns pourraient avoir du mal à renoncer à tout ce qu’ils ont été et ont connu et finalement devenir cyniques…
La combinaison des expertises est une force
à l’instar du gnou et du zèbre dont l’alliance permet d’assurer leur survie dans la savane, l’importance de la complémentarité des individus (compétences, traits de personnalité, aspirations en termes de carrière…) dans les entreprises avait déjà évoquée lors du précédent comité stratégique.
Cette fois-ci nous nous sommes posés la question suivante « Comment une entreprise peut elle réussir à faire cohabiter des profils très différents – dans un monde qui va de plus en plus vite – dans l’objectif d’engendrer performance et créativité ? ». Autrement dit, comment réussir à concilier les intérêts et les modes de fonctionnement de ceux qui gèrent et de ceux qui développent, mais aussi de ceux qui savent et de ceux qui font ?
Souvent considérées comme divergentes, les visions de l’expert, du spécialiste et du généraliste sont en réalité complémentaires, et l’utilité de chacune peut même être supérieure si l’on parvient à les combiner !
La suprématie de la vision de l’expert (celui-ci étant considéré comme le sachant) s’amoindrie sous le joug de l’accès libre à l’information et du Big data qui font croître les savoirs de façon exponentielle. Michel Barabel(1) précise que « Même un expert est dans l’impossibilité de maîtriser l’ensemble des compétences nécessaires à son métier. Il ne s’agit plus de disposer de savoirs ancrés dans le passé mais d’être capable de renouveler sans cesse son stock de compétences. La valeur d’un individu tient plus à ses capacités d’apprenance (capacité à apprendre) qu’à ses capacités de mémorisation. »