Administrer les Ressources Humaines

Dans un contexte de pression managériale, l’entreprise ne perçoit plus la valeur ajoutée des ressources humaines.

Le 1er janvier 2005, le département « Ressources humaines » de la ville de Troyes était officiellement renommé « service des Richesses Humaines ». Le terme ressources, ayant été affecté plus opportunément au budget, rebaptisé « département des Ressources Financières ». L’anecdote pourrait paraître futile. Elle est en réalité révélatrice d’un mouvement qui entend contrer la marche forcée vers la taylorisation des RH et la course à l’EBIT (Earning Before Interest & Taxes). Car si la plupart des DRH considèrent que les premières richesses de la collectivité sont assurément constituées des hommes et les femmes qui la composent, pour l’heure, chacun est conscient d’un vrai resserrement des boulons.

Quel paradoxe !

Priorité à la compétence individuelle

Selon la théorie du système néo-taylorien – ou néo-libéral – la priorité devrait être donnée à la compétence individuelle. Mais la culture des entreprises françaises, oscillant entre socialisation collective et libéralisme non assumé, s’est contentée d’administrer les ressources humaines comme si la socialisation collective était suffisamment forte pour que les faibles et les moins compétents s’y retrouvent, quitte à sacrifier leur bien-être et leur épanouissement personnel. Sans doute a-t-on jugé que la gestion par les compétences allait accentuer, au contraire, l’isolement du collaborateur ou provoquer des tensions inacceptables dans les environnements où le dialogue social ne s’exprimait pas dans le meilleur des mondes possibles.

Jusqu’à présent, force est de constater que tout le monde a été perdant : nul changement organisationnel en profondeur, destiné à mieux intégrer les jeunes diplômés, gérer avec plus d’acuité les carrières, et offrir des débouchés aux seniors autres que les dispositifs hypocrites de préretraite. Du côté du monde universitaire, la surreprésentation des cultures scientifiques, la faible culture de la mobilité et le manque d’aptitude au transfert des savoirs (mise au rancart des seniors et échecs des reclassements collectifs) ont abaissé la confiance que les salariés pouvait avoir dans les RH. Résultat : le fossé entre les managers et leurs directions s’est accru et, last but not least, le peu de crédit des organisations syndicales s’est évanoui, désormais contraintes à la surenchère permanente.

Méfiance tous azimuts

La tendance à la méfiance tous azimuts intervient au moment où la vision que les cadres et les employés ont de leur entreprise se dégrade d’années en années.

Aujourd’hui, les salariés à qui l’on ajoute la disparition de l’intimité corporelle par le contrôle électronique des déplacements se sentent physiquement mal l’aise dans un environnement où la force centrifuge de la pression managériale brise la cohésion des équipes.

Bref : les chefs d’entreprise et les directions opérationnelles ne comprennent plus la valeur ajoutée des ressources humaines.

Face à cette dégradation de l’affectio societatis – cette volonté qu’ont les membres d’une même équipe à nourrir un un objectif commun – l’entreprise commence à réaliser que la carte maîtresse est celle de l’individualisation des parcours et du sentiment de réalisation de soi.

Comment concevoir les RH, dans ce contexte ?

Pour éviter se sombrer dans le pessimisme – certains se demandant si l’existence même de la fonction de DRH n’est pas compromise à l’horizon 2030 – il faut tenter de comprendre la mutation des organisations ainsi que ses process comme un complet changement de paradigme, pour ainsi dire une révolution.

Révolution n’est pas un vain mot. Celle qui est en train de se jouer dans l’implémentation des SIRH en mode serviciel est d’abord celle de la dématérialisation. Une dématérialisation porteuse de toutes les espérances, comme le remarquent les consultants chargés de mettre en œuvre cette dématérialisation SaaS (software as a service). Le SaaS apparaît comme une possibilité de revaloriser non seulement la fonction RH, mais également la relation entre les RRH et le management intermédiaire.

Le management de proximité (re)découvre en effet, dans cet outil, un nouveau moyen de relayer la stratégie. Quant aux services RH, ils constatent que sa mise en place – réduite de 90 % en termes de délais par rapport aux ERP classiques – libère autant de temps pour assurer pleinement leur métier de conseil auprès des « clients internes », salariés et managers.

Extrait de La Révolution Silencieuse des SIRH 2.0Jean-Marc Satta
© 2011, Editions Delavilla, Paris (www.editionsdelavilla.fr)

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